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dimanche 28 avril 2024

1340-NICE, LA RÉNOVATION DU LYCÉE DANS LES ANNÉES 1860 ET 1870

 

SOMMAIRE DES ARTICLES DU BLOG ET LIENS DIRECTS


1- MONTALIVO Ch. (?-?), dessinateur, DYONNET Charles (c.1822-c.1880), graveur,
Plan de la ville de Nice, 1856,
détail montrant les bâtiments du Collège National,
carte de 56x43 cm, B. Visconti, éditeur à Nice, Paris, BnF (Gallica).

Ce plan de 1856, présentant l'état du Collège National avant l'Annexion française, a été préféré à celui de 1860 car il détaille davantage les bâtiments et indique, à l'est, l'emplacement de l'église Saint-Jean-Baptiste (XVII° siècle) accostée de sa tour carrée (1806). Les bâtiments sont anarchiquement regroupés autour d'une grande cour centrale qu'ils enferment et précédent de grands jardins au nord (avec le grand et célèbre melaleuca linearifolia planté en 1811). Les deux bâtiments sud-ouest n'appartiennent pas à l'établissement. 



INTRODUCTION


De nombreuses études ont été consacrées aux bâtiments qui ont précédé l'actuel Lycée Masséna de Nice. Ces anciens bâtiments (couvent), bâtis dans la première moitié du XVII° siècle par les Augustins déchaussés, ont servi d'établissement d'enseignement (jusqu'en 1792). 

Au tournant du XIX° siècle, les Français y ont ouvert une Ecole Centrale puis un Lycée Impérial. Suite à la chute du Premier Empire, l'établissement est devenu un Collège Royal tenu par les Jésuites puis, après leur expulsion (1848), un Collège National.

Cet article a pour but d'étudier la rénovation et l'agrandissement des bâtiments du Lycée dans les années 1860 et 1870.


2- TRACHEL Ercole (1820-1872), dessinateur, DURAND Godefroy (1833-1896), graveur, 
Les habitants de la campagne et de la ville de Nice 
se rendant au scrutin pour l'Annexion par le faubourg et le Pont Vieux,
estampe extraite de L'Illustration, 1860, Collection privée.

L'estampe montre notamment la place du Collège où le scrutin se déroule les 15 et 16 avril 1860. 
Face au Pont-Vieux, les façades du Collège National sont dominées par la tour de l'église Saint-Jean-Baptiste
 et son horloge.

3- GUIAUD Jacques (1810-1876), dessinateur, DURAND Godefroy (1833-1896), graveur, 
Les Habitants de la ville de Nice se rendant au scrutin, 1860,
estampe extraite de L'Illustration, 1860.
Nice, Bibliothèque municipale Romain Gary, Est.1526 (FR).

L'estampe révèle la place du Collège, avec notamment sur la gauche, l'entrée du Collège National



LES ANNÉES 1860


1860-1861

Un Lycée Impérial est recréé à Nice lors de l'Annexion française, par décret du 13 juin 1860. Ses classes vont rouvrir dans les locaux de l'ancien Collège sarde, situé près du Pont-Vieux, au nord du quai Saint-Jean-Baptiste (classes d'école, de collège et de lycée) (Images 1 à 3 ci-dessus). 

Ses bâtiments sont cependant vétustes et eux-mêmes accostés de masures malsaines aux façades délabrées et non alignées qui bordent un quai trop étroit où la circulation est gênée. 

Les décrets du 28 juillet 1860 puis du 18 août 1860 attribuent au Lycée Impérial de Nice la somme de 60,000 francs "pour contribution aux dépenses d'appropriation des bâtiments et d'acquisition du mobilier nécessaire", ainsi qu'un prêt sans intérêts de 40,000 francs sur quatre ans (J.-B. Duverger, Collection complète des lois, ordonnances, règlements et avis du Conseil d'Etat, 1860, t 60, p 506).

Un plan général de rénovation du Lycée est établi, détaillé et chiffré mais sa mise en œuvre nécessite un étalement des dépenses sur plusieurs exercices. Dès l'été 1860, des travaux sont cependant entrepris (syndic François Malausséna [1814-1882], proviseur Henri Joseph Chevriaux [1816-1883]) et sont décrits début octobre, lors de la nouvelle rentrée des classes :

"La beauté de l'installation ne laisse rien à désirer. Le plafond des dortoirs a été élevé (...), Les salles d'études sont spacieuses, bien éclairées et pourvues tout autour d'un parquet (...). La transformation n'est pas moins complète dans les classes, dans l'infirmerie, la lingerie et jusques dans les réfectoires et la cuisine. Nous avons remarqué à côté une salle de bains. Un canal d'écoulement a été pratiqué sous le sol pour recevoir les eaux de pluies qui croupissaient auparavant dans la grande cour de récréation (...).

La rectification du quai St-Jean-Baptiste pour la traverse de la route impériale amènera très-probablement la destruction d'un coin de la façade du lycée (...). L'amélioration extérieure la plus importante, dont la municipalité devra tôt ou tard s'occuper relativement au lycée, concerne l'élargissement de la rue infecte qui longeant la façade de l'établissement, se dirige vers Carabacel" (Le Messager de Nice du 5 octobre 1860).

Lors de sa venue à Nice les 12 et 13 septembre 1860, l'Empereur Napoléon III a convenu du vilain effet de cette zone qui ne correspond pas à l'aspect luxueux du reste de la rive droite et entrave la circulation et a décidé d'engager la participation de l'Etat dans la rénovation de l'ensemble du quai Saint-Jean-Baptiste. Un décret impérial du 10 novembre 1860 classe le quai Saint-Jean-Baptiste au nombre des routes impériales afin d'en permettre la rectification et l'élargissement et engage l'Etat au tiers de la dépense.

L'été 1861, lors de la première distribution solennelle des prix du Lycée, M. le Recteur de l'Académie d'Aix (en-Provence) rappelle que "cet établissement est sorti comme par prodige des ruines de l'ancien collège" (Le Messager de Nice du 1er août 1861).

Entre le 14 juin 1860 et le 1er décembre 1861, ce sont 215,000 francs qui sont accordés par l'Etat et le Conseil Général des Alpes-Maritimes "pour réparation et agrandissement du lycée à Nice" (Joseph Roux, Statistiques des Alpes-Maritimes, 1862, vol. 2 p 435). 

Les dépenses engagées lors de cette même période pour l'ameublement et les travaux de rénovation du Lycée ne sont que partiellement connues.


4- MOOSBRUGGER Peter (1831-1883), Nice, Le Lycée Impérial et le Pont-Vieux, vers 1861-1865,
tirage argentique de 23,5x18 cm, réalisé par les Editions Gilletta au XX° siècle dans la série "Nice Ancienne", Collection personnelle.

La prise de vue date peut-être de l'époque où Peter Moosbrugger présente des paysages de Nice à l'Exposition de la Société Photographique de Marseille, en mai 1863. La photographie montre l'enchevêtrement de façades non alignées face au Pont-Vieux avec, le long du quai (de gauche à droite), l'immeuble du "Café du Faubourg Saint-Jean-Baptiste" et du "Bureau d'Assurance Cie Contre l'Incendie, la Grêle et la Vie Humaine", les façades
 du Lycée Impérial dominées par la Tour et l'horloge de l'église Saint-Jean-Baptiste puis la place du Lycée avec notamment "l'Hôtel du Chapeau Rouge".



1862-1865

A la distribution des prix du 30 juillet 1862, M. le Préfet annonce que le Lycée "va recevoir un agrandissement qui lui permettra, au retour des vacances, d'accueillir un plus grand nombre d'élèves internes, de leur offrir des classes et des cours plus spacieuses, en un mot, de leur donner plus d'air et de lumière, choses si nécessaires à leur santé" (Le Messager de Nice du 31 juillet 1862).

En septembre 1862, des travaux sont en cours afin de restaurer la vieille église Saint-Jean-Baptiste. Cet édifice du XVII° siècle a longtemps servi d'église paroissiale avant d'être remplacé, en 1852, par l'Eglise Notre-Dame-du-Vœu. Elle n'est utilisée, depuis cette date, que comme garde-meubleL'idée est d'en faire la nouvelle chapelle du Lycée, afin de convertir l'actuelle chapelle intérieure du Lycée en deux vastes dortoirs. 

Les travaux se continuent cependant plusieurs mois après la rentrée des classes avec, dans les nouveaux dortoirs, la pose innovante d'un plancher métallique de plus de 300 m de surface, sans aucun point de soutien intermédiaire (Le Messager de Nice du 8 septembre et du 25 octobre 1862).

Le 19 septembre 1863, le Tribunal de première Instance de Nice prononce, afin de permettre l'agrandissement du Lycée, l'expropriation de terrains (jardins, cours) et bâtiments (maisons en mauvais état ou en ruines, bâtiments en planches) situés au nord et à l'est du Lycée et, notamment, rue et ruelle du Collège et rue place d'Armes (Journal de Nice du 12 octobre 1863) (Images 4 ci-dessus et 5 ci-dessous).

Le 8 janvier 1864, la ville de Nice est autorisée par le Sénat à utiliser, pour l'agrandissement du Lycée, une partie de la somme restant libre de l'emprunt contracté en exécution du décret du 30 décembre 1860 (Procès-Verbaux des séances du Sénat, 1864 p 244). 

Les travaux d'agrandissement sont entrepris mais leur détail reste, là encore, en partie inconnu, la plupart des textes ultérieurs se contentant de signaler que "le lycée a été récemment agrandi" (Guides de Voyageurs, Dictionnaire des Communes, Journaux). 

Le 8 mai 1864, l'Evêque de Nice bénit cependant la vieille église Saint-Jean-Baptiste du XVII° siècle, récemment restaurée et fortement agrandie, et la rend au culte comme chapelle du Lycée (Journal de Nice des 8 et 9 mai 1864). 

Les travaux du Lycée s'achèvent début octobre 1865, repoussant la rentrée des classes d'une semaine, "pour laisser aux ouvriers le temps d'achever l'appropriation des cours de récréation et des nouvelles salles d'études" (Journal de Nice du 30 septembre 1865).

A la rentrée d'octobre 1866, "la division élémentaire" libère de la place aux enseignements secondaires, en quittant les locaux du quai Saint-Jean-Baptiste pour s'installer à Carabacel, dans l'ancienne maison de retraite des Jésuites (1775). Cette maison qui a reçu de nombreuses destinations au XIX° siècle, notamment Hôpital militaire (1850) puis Ecole Normale des Instituteurs (1861-1866), devient désormais une "Annexe du Lycée Impérial" ou "Petit Lycée" (emplacement de l'actuel Collège Roland-Garros). 


 5- EHRARD Georges (1821-1880), Plan Indicateur de la Ville de Nice, 1865, 
détail montrant le Lycée Impérial et, en rouge, l'alignement prévu
 et les projets de la municipalité (Plan régulateur),
Charles Jougla (1834-1909), éditeur,
Paris, BnF (Gallica).

Les bâtiments de l'établissement apparaissent moins détaillés que sur le plan de 1856 (Image 1 en tête d'article). La grande cour est représentée plus étroite mais toujours sans sa fontaine centrale. L'agrandissement récent des locaux du Lycée n'est perceptible que par le bâtiment continuant l'angle nord-est du Lycée. La petite rue Saint-Jean-Baptiste longe une partie de la façade occidentale de l'établissement. Du côté oriental, la place du Collège est devenue la "place du Lycée" mais la rue et la ruelle du Collège ont conservé leur nom d'origine. Au nord-est du Pont-Vieux, débute la rue de la place d'Armes.



En ce qui concerne la réfection du quai Saint-Jean-Baptiste, quelques améliorations sont apportées (Le Messager de Nice du 19 septembre 1862) mais plusieurs années s'écoulent sans que des travaux d'ampleur ne soient entrepris. En effet, malgré l'aide assurée de l'Etat (au tiers), le budget à la charge de la municipalité reste très conséquent et d'autres travaux apparaissent davantage prioritaires.

Le projet se concrétise cependant grâce à un accord passé, le 4 août 1864, entre la municipalité et la Société immobilière lyonnaise Poncet. Les expropriations sont prononcées (1864-1865). Au printemps 1865, la municipalité recourt à un emprunt s'élevant à 1,110,000 francs, remboursables sur quarante années à partir de 1866 et cet emprunt se voit accordé en septembre 1865 (Journal de Nice des 20 août et 20 octobre 1864 et du 7 mai 1865 ; Archives Municipales, 1D1-3, Conseil municipal du 19 septembre 1865).


1866-1868

Les travaux de rénovation du quai Saint-Jean-Baptiste sont ensuite engagés. Ils s'échelonnent de 1866 à 1868, comprenant la démolition des masures de la partie nord, le déblaiement des décombres, l'ouverture de trois rues transversales (1866), la construction du mur de digue du Paillon, l'élargissement et le nivellement de l'ensemble du quai (1866-67) et la construction de grandes et nouvelles maisons et hôtels (1867-68).

Cependant, le projet d'alignement du quai (démolitions) ne va pas jusqu'à la place d'Armes ni même jusqu'au Pont-Vieux et, malgré le fait que la voie soit refaite, le Lycée Impérial se retrouve en contrebas du nouveau quai. 

A l'automne 1867, la rénovation des façades du Lycée est encore espérée mais elle ne fait pas partie du projet. La rectification de la façade méridionale reste en attente, ainsi que le déplacement de l'entrée de l'établissement, de la place du Lycée face au quai Saint-Jean-Baptiste (entrée masquée par l'exhaussement de la rampe d'accès de la rue place d'Armes au Pont-Vieux)  (Les Echos de Nice du 5 octobre 1867). 


6- EHRARD Georges (1821-1880), graveur, Plan Indicateur de la Ville de Nice, novembre 1867,
Charles Jougla (1834-1909), éditeur, Nice,
Nice, Archives Départementales des Alpes-Maritimes, 1 Fi 229.

"Le nouveau plan indique les travaux accomplis (...), le nouveau quai Saint-Jean-Baptiste"
(Journal de Nice du 24 novembre 1867). 

Les deux bâtiments qui étaient situés au sud-ouest du Lycée (comparer avec l'Image 5 ci-dessus) ont été démolis en avril 1866 pour dégager l'établissement et ouvrir la nouvelle rue Saint-Jean-Baptiste, avec un tracé légèrement différent de celui envisagé en 1865 (Image 5 ci-dessus). 



Un point sur les travaux du Lycée est fait en janvier 1868 : "Malgré les dépenses considérables qui ont déjà été faites, de compte à demi par la Ville et l'Etat, depuis l'annexion, pour approprier le local occupé par le lycée, il reste d'importants travaux à exécuter (...). 

La partie vraiment urgente comprend la construction du bâtiment destiné à l'administration, en façade sur le quai, à laquelle se rattache la consolidation de la chapelle, et le mur de clôture sur la rue récemment ouverte au nord-ouest" (Journal de Nice du 25 janvier 1868).


7- DEGAND Eugène (1829-1911), Nice, Panorama des quais, détail, vers 1870, 
vue prise depuis la Tour Saint-François,
tirage albuminé de 21 8x14,7 cm, Collection personnelle.

Noter la présence des arbres nouvellement plantés sur le quai Saint-Jean-Baptiste (mars-avril 1870),
 l'inscription "Lycée Impérial" encore présente au sommet de la façade latérale de l'établissement
 et la présence de grands arbres dans la cour du Lycée. 



LES ANNÉES 1870


Les travaux du Lycée restent cependant en attente de 1868 à 1870 puis se voient repoussés par les évènements de 1870 et 1871, jusqu'en 1874.


8- LÉON Moïse (1812-1888) et LÉVY Isaac dit Georges (1833-1913),
 Nice, vue prise  du Château, vers 1873,
détail du quai Saint-Jean-Baptiste, de la place du Lycée et de la rue Gioffredo, 
plaque de verre pour lanterne magique de 8,2x8,2 cm, Collection personnelle.



1874-1877

A partir de 1874, le projet de rénovation semble se préciser. Le crépissage et le badigeonnage de la façade nord-ouest du Lycée sont votés début septembre 1874 (Archives Municipales, 1D1-9, Conseil municipal du 7 septembre 1874 ; Journal de Nice du 11 septembre 1874). 

L'arrivée, à la rentrée d'octobre 1874, d'un nouveau proviseur, Gabriel-Ernest Gallerand [1814-1889], ancien vice-recteur de Corse, va être déterminante.

En octobre, la Commission d'hygiène du Lycée, accompagnée de l'architecte de la ville visite l'établissement en détail et constate notamment que le logement du censeur des études est inhabitable, qu'une aile du bâtiment servant de salles d'études et de classes se trouve dans des conditions d'hygiène également déplorables et que la façade du Lycée regardant le quai Saint-Jean-Baptiste est une honte (Journal de Nice du 26 octobre 1874). 

Les bâtiments du côté des jardins sont certes recrépis et badigeonnés en octobre mais le reste des travaux se fait attendre : "Quand songera-t-on à réparer les constructions du même établissement qui regardent le quai Saint-Jean-Baptiste ? Quand délivrera-t-on ce quartier de ce réceptacle d'immondices et dispensera-t-on la vue de la lèpre immonde qui recouvre ces murs honteux ?" (Journal de Nice du 1er novembre 1874).

Début 1875, l'horloge de l'établissement elle-même n'est plus fiable et c'est un roulement de tambour, fait à la porte principale du Lycée, qui indique désormais l'heure de rentrée des externes (Journal de Nice du 17 février 1875).

Les travaux de rénovation des façades donnant sur le quai Saint-Jean-Baptiste, projetés depuis 1868, sont enfin décidés par la municipalité en janvier 1875, soumis au Ministre en février (devis révisé) et validés en mars (Archives Municipales, 1D1-10, Conseils municipaux du 13 janvier et 24 février 1875).

L'initiative, l'activité et la persévérance du nouveau proviseur ont été efficaces : "Nous apprenons que le ministre, d'accord avec la municipalité, vient d'ordonner les travaux à faire pour l'établissement de la façade du lycée sur le quai Saint-Jean-Baptiste. La somme affectée provisoirement s'élèverait, nous a-t-on dit, à 113,000 fr." (Journal de Monaco du 13 mars 1875).

Les travaux de réparation et de construction de la façade sont adjugés en mai 1875 et débutent à la fin du mois de juin 1875 par la démolition de l'extrémité des anciens bâtiments et le nivellement du terrain. Une convention définit la livraison de la nouvelle façade au bout de 7 mois, soit en janvier 1876 (Journal de Nice des 19 mai et 4 juillet 1875).

Rien ne va cependant se passer comme prévu. Fin août 1875, une grande fosse commune réunissant plusieurs milliers d'ossements humains est découverte lors des fondations de la nouvelle construction et retarde le chantier (Journal de Nice du 25 août 1875).

Fin septembre 1875, un différend concernant l'alignement de la nouvelle façade oppose désormais l'entrepreneur et les ingénieurs des Ponts-et-Chaussées. Les travaux semblent alors suspendus. 

Le détail de l'affaire n'est pas connu mais la difficulté ne semble résolue qu'au bout de plusieurs mois, les retards s'accumulant (Journal de Nice du 22 septembre 1875 ; Archives Municipales, 1D1-10, Conseil municipal du 22 septembre 1875).

Pendant un an, aucun article ne signale plus la marche des travaux. Une explication est cependant fournie à l'automne 1876 : "La lenteur avec laquelle cette magistrale construction est sortie de terre, tient à ce qu'on a été forcé de mettre l'entrepreneur en régie" (remplacé à ses frais à cause de ses difficultés et retards) (Journal de Nice du 4 octobre 1876).

Le Conseil municipal du 28 mars 1877 approuve d'autre part les travaux à exécuter pour la restauration et la consolidation de la chapelle du Lycée (Journal de Nice du 16 avril 1877).

En avril 1877, les travaux de façade sur le quai Saint-Jean-Baptiste sont en cours d'achèvement, donnant une nouvelle apparence tant à l'établissement qu'au quartier (Journal de Nice du 4 octobre 1876).

Début mai 1877, le bâtiment de façade est enfin terminé et débarrassé de sa cloison en planches qui en défendait l'entrée. Seuls quelques jours semblent encore nécessaires pour régler des détails extérieurs et intérieurs. Cependant, cette façade n'est, "au dire des gens compétents, qu'un replâtrage" (Journal de Nice du 9 mai 1877).

Fin juin 1877, un campanile est édifié au sommet du grand fronton triangulaire qui couronne la façade, avec une petite cloche reliée à l'horloge installée pour sa part au centre du fronton (Journal de Nice du 22 juin 1877) (Images 9 à 11 ci-dessous).



9- DEGAND Eugène (1829-1911), Nice, Panorama des quais, vers 1877
vue prise de la Tour Saint-François,
 tirage albuminé de 10,5x6 cm, sur carton de 11,8x7,2 cm, 
Collection personnelle.

Comparer avec les Image 7 et 8 ci-dessus pour réaliser la partie de la façade donnant sur le quai qui a été démolie puis reconstruite.



Ce bâtiment, commencé en juin 1875, aura nécessité deux années entières pour être livré. Il est constitué de quatre niveaux et domine les autres locaux de l'établissement. Sa face principale aligne 9 baies et ses faces latérales, 2 baies seulement. Ce bâtiment est peu profond du fait de la forme du terrain et ne permet que des dortoirs étroits, installés au-dessus des bureaux de l'administration du Lycée.


10- Plan Pittoresque de la Ville de Nice, dressé le 1er janvier 1878, détail,
Nice, Bibliothèque municipale du Chevalier de Cessole.

Le Lycée est représenté ici en élévation, avec sa nouvelle façade.



ÉPILOGUE


Dès les années 1880, les locaux du Lycée s'avèrent à nouveau insuffisants et les hypothèses d'un déplacement ou d'un agrandissement sont évoquées à de nombreuses reprises. L'établissement va être entièrement reconstruit et agrandi, entre 1909 et 1931, au même emplacement (avenue Félix Faure), puis dénommé "Lycée Masséna" dès 1963.

Le Lycée du XIX° siècle a donc totalement disparu. Son souvenir subsiste cependant au travers des textes et des photographies. Les façades de l'ancien Lycée sont notamment des repères visuels importants qui permettent de dater de nombreuses photographies de la ville.


11- ÉDITIONS GILLETTA, Le Pont-Vieux et le Lycée, vers 1900, 
tirage argentique de 23,5x18 cm, réalisé au XX° siècle dans la série "Nice Ancienne",
 Collection personnelle.




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